vendredi 4 février 2011

Damas

To Syria
Le matin du départ Toleen a comme d'hab deux heures de retard. Eric et moi allons prendre un petit déjeuner dans un resto surpeuplé qui s'étale sur tout une minuscule ruelle. On est reçu sans joie particulière mais la bouffe, pas spécialement petit dej friendly est délicieuse. Falafel, houmous, purée aillée de haricots rouges, le grand classique. Les tables de la ruelle étant occupées nous mangeons dans un espace couvert (mais ouvert) au plafond en lamelles de métal crasseux comme un garage à bagnole, je n'ose même pas regarder la tenue des serveurs. Beaucoup d'hommes, une écrasante majorité.


Avons pris ensuite un taxi genre voiture de luxe VIP (pour 50 euros à 3, 130 bornes, 3 heures) au marché de Amman, où des rabatteurs répètent "Sham" (Damas, et par extension Syrie en vieil Arabe, mais ils emploient aussi la version moderne qui se prononce "sou-ria" ou Suriyah) comme un mantra.


Après l'interminable East-Amman le paysage dévie lentement vers le méditerranéen. Les collines sont un peu plus habitées de vert, on aperçoit ci et là des arbres et même une fois un étang. Byzance est encore loin. Mais le monde semble déjà un peu plus doux.


La frontière prend des plombes. Un contrôle de passeport jordanien. Puis arrêt à un poste pour payer la taxe de sortie. Nous faisons la queue dans un assez joyeux chaos de turcs, de jordaniens, de syriens, d'irakiens et de saoudiens mêlés. Nombreuses femmes recouvertes de noir, des pieds au crâne. Notre groupe américano-jordano-français fait sensation. La queue pour payer et obtenir un ticket, la queue pour obtenir le tampon de sortie contre le ticket. Puis un dernier contrôle du visa de sortie, puis c'est la Syrie. Je m'agace de cette particularité locale, cette habitude qu'on les gens à ne jamais respecter la queue (encore un point commun avec les israélien) et à vous passer devant comme des malotrus, à pousser leur passeport dans la guérite au moment où c'est à vous de parler. J'essaie une minute de la jouer digne, "je suis au dessus de ça, vous l'emporterez pas au paradis, je resterai stoïque et allemand 10 vies si il le faut", et puis au final je me jette dans la mêlée. Après le tampon et check du visa, un petit dernier contrôle de passeport et nous voilà en Syrie.
J'aime les voyages et je hais les frontières. Je suis un gars prévisible.


Tout de suite une fois quitté le no man's land on est frappé par les cultures, l'irrigation. La richesse en eau de la Syrie impressionne. Comme si la frontière était une ligne de partage des eaux. On est maintenant en Toscane avec des minarets. La terre rouge, les oliviers (et des maisons pas finies en parpaing ou en béton cru, il faut pas déconner non plus) à la lumière orange du soleil couchant. A notre gauche un peu plus loin sur la ligne d'horizon, le Golan, sa majesté disputée et ses bruits de bottes.


Damas


Amman n'est qu'une agglomeration, Damas est une ville, vieille comme la terre de ses collines ratiboisées mais assez vivante pour que le passé glorieux ne soit pas son seul sujet de préoccupation.


Toleen me dit que les arabes aiment trouver des raisons extérieures à leur malheur. Les occidentaux, le satan américain, Israël. Pour le rendre inéluctable. Cette tendance arabe à pleurer leur horrible destin plutôt que de vouloir le changer.
En ce sens la revolution tunisienne a pris tout le monde par surprise, jeunesse éclairée comprise. Cette melancolie anihilatrice d'énergie remonte selon-elle à plus loin encore que la religion elle-même, il serait bien trop facile de la mettre sur le seul dos de l'Islam.


C'est peut-être bien ce qui explique l'omnipresence de ferrouz. Dans le taxi défoncé qui nous fait traverser la ville le premier soir pour aller manger un repas merveileux dans un beau café de la vieille ville, Ferrouz. Chez A et Z chez qui nous logeons, Ferrouz. Dans les boutiques, Ferrouz. Toute cette foutue melancolie orientale, cet espèce de cocon de poésie raffinée mais triste pour amortir le choc de pierre et de metal de la vraie vie. C'est vrai qu'à mes oreilles Ferrouz parle à quelque chose de profond, à un masochisme ancré en chacun qui se déguise sous le nom de "beauté". Et parle à cette sophistication incroyable qui est disséminée dans à peu près chacun des objets de la vie quotidienne, dans chaque détail de la ville peut-être plus vieille que Mathusalem. Quand Saint-Paul (dont je n'ai trouvé aucune Tarse) y trouve la voie d'Ananie et de dieu la ville est déjà multimillénaire, ce qui permet de relativiser le règne de El-Assad...


La ville est chargée. mais elle se présente au naturel, pas du tout maquillée comme une voiture volée, non, juste bien tenue, et son passe glorieux ne ressemble en rien à un obstacle à son present disons foisonnant ("Syrie terre de contrastes", etc").


Avant d'atteindre le centre on est encore sceptique, les banlieues parpaing poussières se succèdent (notamment un célèbre camp de réfugiés palestiniens maintenant construit en dur, 60 ans de camps, le prix de Israël), lentement remplacées par ces incongruités que sont les boutiques modernes climatisées opulentes raffinées ou vulgaires mais brillantes comme des sous neufs au milieu de terrains vagues affreux envahis par les sacs plastiques... C'est un truc que mon esprit occidental ne comprendra jamais.




A Damas, avons logé chez A, un ami de Toleen, un barbu aux cheveux longs d'une trentaine d'années grand et maîgre malicieux et doux comme une crème. A est un incorrigible fumeur de pétards et son succès en tant qu'acteur (et professeur de mime pour des classes de 70 élèves sourds-muets, oui), en tant que metteur en scène, en tant que poète (il a "gagné un prix" comme on dit, mais à la vérité sa poésie telle que traduite par Toleen m'a beaucoup plu, à ma grande surprise) ne peut pas dissimuler une demi-seconde le fait qu'il vive dans un trou à rats d'adolescents attardé de trente ans. Un petit appartement dans un dernier étage ajouté d'un immeuble ancien d'un beau quartier (Shaalan), un petit appartement de collocation avec une chambre sans fenêtre, une salle commune à peine plus large que le petit couloir où trône un canapé au velours fileux aussi pelé que les montagnes jordaniennes, probablement hôte d'une des plus belles collections de puces de Damas (un petit chien, loulou, y fait ses languides et enthousiastes siestes à répétition), en face d'une petite table basse et d'une grande table en verre, un ensemble verre-fer avec les chaises assorties. La pièce n'a qu'une minuscule fenêtre grillagée,
Elle débouche sur une cuisine sale où les champignons, comme le peuple tunisien, se sont élevés tous seuls.
Tous les soirs, autour de la table basse de contreplaqué graphitée au marqueur, au son du petit laptop vaio qui peut jouer du Múm comme du Ferrouz, toute une société de trentenaires plus ou moins artistes viennent fumer le libanais de Zazour (le colocataire)et boire du whisky comme d'autres sirotent du thé à la menthe en racontant des histoires à faire rire ceux qui fument le calumet.
J'y ai goûté un soir, mais les joints étaient si forts, si épicés, minéraux, si goudronnés que j'ai failli en perdre mes dents et mes poumons, j'ai plus l'habitude. Ils rient comme rient tous les fumeurs de pétards du monde à leur propre et autosatisfaite et grégaire conscience de leur bêtise amusée.
Pas la peine de comprendre l'arabe pour saisir ces choses. A est un incorrigible fêtard et expérimentateur qui passe des journées sous LSD à entendre des voix crier son nom, et même à avoir des conversations avec elles dans le centre agité de Damas, et même à engueuler dieu.
Zazour improvise un soir sur la pomme du mac d'Eric, mêlant le mythe de la bible et celui de Newtown et parvenant à la conclusion "la femme est la gravité". Puis il m'explique dans un rire heureux toujours quasi sans un mot d'anglais qu'il est le nouveau Sanson (zanzoon), sans cheveux (il est chauve) et sans force (il est maîgre comme un clou).
Passent des dizaines de personnes qui viennent relater et remémorer des aventures dignes d'être chantées sur tous les canapés pouilleux du monde.


Avons passé la première soirée au restau puis dans une maison d'expats français, une superbe maison de deux étages disposés autour d'une petite cour intérieur où est planté un lavabo, cours qu'il faut traverser pour aller se doucher ou pour atteindre la cuisine sans porte. Magnifique ouvrage du siècle dernier, où l'été on doit lézarder en piochant négligemment du raisin à même la vigne vierge. La collocation d'expats français respire l'expatriation exaltée, que je trouve toujours un peu zoneuse. Ils nous jouent des chansons à la guitare que je ne commenterai pas. A sort avec l'une d'entre elle, qui me plait d'ailleurs beaucoup, une femme au caractère trempé, en béton armé d'acier inoxydable et à la gouaille impayable. Une jeune française étudiante en droit venu apprendre l'arabe détonne par son sérieux et son teint pâle quasi victorien. Elle explique à une nouvelle venue arrivée trois jours plus tôt qu'elle a décidé de vivre dans la banlieue de Damas, dans un couvent de jeunes filles chrétien, où l'immersion est totale. Elle a peut être raison sur le fond, mais dieu que cette rigueur est emmerdante. Alors que nous pensions aller nous coucher après que A nous ai emmené chez d'autres gens, avec toute la maison de français, d'autres gens pas spécialement ravis de recevoir 12 personnes d'un coup sans etre prévenus, A, qui est du genre conciliant, a invité, à notre grand désespoir Toleen, Eric et moi, les deux maisonnées réunies à venir fumer le calumet chez lui.


A. avec sa voix douce raconte sa dernière pièce, un monologue à la mise en scène minimaliste, je veux dire presque inexistante, reprise d'un texte français que je ne connais pas, "Contre". Le texte réadapté à la situation syrienne est un hymne à l'opposition qui ne cite pas d'ennemis. Au principe d'opposition. Les forces de sécurité ont bien entendu vu la pièce et même exprimé un certain mécontentement, sans toutefois l'interdire. Une fois, un spectateur saoul s'est mis à crier des slogans pro-tunisien. A. ou zazur je ne sais plus, sûr de la force de leur théâtre, je veux dire sûrs que leur théâtre est la politisation dont a besoin la Syrie, ont renvoyé le gars sans ménagement d'un "va t'immoler dehors si tu as un peu d'honneur, sinon tais-toi". Je suis assez choqué, mais je la ferme. Je sens cela-dit un relatif désintérêt chez eux pour l'incendie tunisien. Comme si la contrainte était si forte qu'elle était intégrée comme l'air ou comme l'eau. Nous sommes à quelques jours, deux, pas plus, du soulèvement égyptien, "l'égypte est un pays stable" comme dirait la Hilary des premiers jours.


impressions de Damas :


un vieux en costume noir et casquette s'allume une cigarette en sortant d'une maison de thé,
bandes de femmes voilées de noir de pied en tête monopolisent le trottoir devant l'immense marché couvert,
taxis défoncés se fraient leur passage au klaxon, - les décorations interieures des taxis tout un poème. quelques conflits psychanalytiques mal resolus qu'on peut déceler quand les schtroumph en peluches ou les loupiottes rouges dépassent la densité de l'acceptable
un vieux chauffeur de taxi nous raconte en se marrant l'histoire d'un Japonais qui ne savait pas prononcer le nom d'une banlieue lointaine et s'est retrouvé à l'autre bout de la ville
une française me raconte qu'elle aussi s'est perdue et qu'un homme est sorti du bus pour l'ammener à la bonne station et lui a payé le billet jusqu'à sa destination
grilles en fer forges des balcons, des portes d'immeubles, des jardins, des parre-soleils,
couple de "milliardaires", l'homme porte un long manteau à la touche 70's presque rock n roll et un Hatta rouge, et sa femme avec ses immenses lunettes de soleil une longue dishdasheh... damasquinée, je veux dire cuivrée, brillante de motifs complexes et dorés sur son tissu vert sombre,
les enseignes peintes et les enseignes lumineuses en arabe et en anglais,
les boutiques qui débordent sur le trottoir, l'armée bien disciplinée de produits chinois très colorés bien rangés sur la place publique
les vieilles villas à colonades et larges balcons, les immeubles des années 30 ou 40, leur bauhaus lascif et ondulent et leurs colonnes de pavés de verre,
les vieux réservoirs à eau en metal d'une seule pièce qui ressemblent à des bulbes de titanium tirés d'un film SF panarabe des années 60
les 4x4 rutilants des gens importants en légères difficultés libidinales
les mosquées de la plus rèche en béton arméàa la plus ridiculement luxueuse en marbre, avec leurs domes fantomatiquement éclairés au néon vert fluo,
les indolentes rues à l'européenne juste assez larges et boisées
les restaurants dans les vieilles maison du 18e siecle (avec leurs cours intérieures carrelées, leur fontaine et leurs colonades, leurs écrans plats et leurs clips egyptiens merdiques)
les portraits du grand leader el assad en grand sur les bâtiments officiels, en moyen sur les balcons des partisans, en pare soleil à pare-brise arrière, en photo de magazine clouée sur un mur, en joli encadré de bois au fond dune arrière-cour, en version photoshopée avec drapeau flottant sur certaines administrations, en photo papier scotchée avec delicatesse pour la proteger du gras du vendeur de kebab, en peinture, en assiette, en tenue civile, en extrudé dans du plexiglas en forme de drapeau, en tenue militaire... infinie profusion du réel
les places immenses avec leurs statues des grands hommes et/ou leur art moderne
les Kebbé nayyé !,
les rues piétonnes proprettes comme un salon bourgeois et débordées par le front intérieur des acheteurs et vendeurs qui s'écoule sous la crudité des enseignes lumineuses,
les cireurs de chaussures qui supplient des hommes d'affaires pressés en train d'ajuster leur Hatta,
les bandes de mômes-mendiants aussi collants que du sparadrap
les colossales structures de bétons des futurs centres d'affaire qui champignonnent dans de vieux quariters, vieil habit Haussmannien colonial remplacé par celui de l'asie industrieuse,
les hordes de climatiseurs carrés à chacune des fenetres,
les vérandas a plantes vertes sur les balcons,
les vérandas illuminées où transparaissent depuis la rue les rayonnages d'une bibliothèque d'acajou,
les terrasses de cafes pleines de narguilés fumants,
les vieilles maisons ottomanes en decomposition,
les petits quartiers de maisons basses à rendre fou un agent immobilier europeen,
les palmiers qui bercent les jardins des beaux immeubles residentiels,
les panneaux de bois précieux et ciré utilisés pour fermer les boutiques de la vieille ville,
les militaires en tenue camouflage qui mangent un cornet de frite assis surla petite colline d un terrain de jeu pour enfant,
les chats,
les grappes de chaussures, de babouches, et de sandales de cuir à épaisses semelles qui pendent à l'entrée des magasins du souk comme des dates trop mures,
les cages à oiseaux dans les restaurants,
les cours intérieures rapidement entrapercues par des portes entrebaillées qui ont avec leur carrelage, leur mobilier de jardin et leru vigne vierge des promesses de bonheur vesperal/estival,
les coifferus au mobilier design d un autre age dans leurs boutique minuscule
les femmes voilees en bottes a talon hauts
les ados qui fument, les vieux qui fument, les grosses femmes qui fument dans leur vêtements amples, les petits vieux qui fument dans leur stand a cigarette, les flics qui fument en faisant la circulation avec leur gros baton orange/blanc, les chauffeurs de taxi qui fument en klaxonant rêveusement,
l improbable original suicidaire (mais non fumeur) en trotinette electrique,
les "service" ou taxis collectifs combi volkswagen ou toyota remplis jusqu'à la gueule de femmes voilées, d'hommes aux cheveux noirs et d'enfants qui embrassent les vitres,
les utilitaires japonais pleins de matériaux non identifiés sous des bâches en sac de riz,
les immeubles pouilleux aux balcons noirs de suie où des parasols affligés pourrissent lentement,
le bâtiment public années 70 aux fenêtres triangulaires comme celles de l'hopital béclère de Clamart, gardé par des hommes en civil armés de mitraillettes,
les tailleurs qui poussent des gros stands de vêtements en fer à cheval sur roulettes à même la route,
les petites cabines "traffic police" au milieu des carrefours, celles en bois, celle en plexiglas et metal,
les petits boutiquiers en jacquard sans manche et en chemise bien repassée qui ont l'air gentil et dignes en toutes circonstances,
les panneaux lumineux des congregations orthodoxes ou catholiques, les enseignes en arabe bleu blanc rouge des boulangeries francaises,
les mosaiques bleues de batiments officiels qui frisent l ubersophistication,
Une petite dizaine de verres d'arrak au milieu d'un festin à faire rougir de honte un végétarien repenti.






Cul de saq
établissement central de matériel de la télégraphie militaire
Société des télégraphes Mildé
Cahiers des charges
Billets I classe
Billets III classe
papier de Damas (marque déposée)
Cabinet dentaire
Coiffeur
Souliers
CEREALES
Maison de repos Saint-Elie
Blanche fleur
Rue Baron




4 fichiers son :
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Deuxième enregistrement de la Grande mosquée des Omeyyades. (Ibn Battuta : « C'est la plus sublime mosquée du monde par sa pompe, la plus artistement construite, la plus admirable par sa beauté, sa grâce et sa perfection. On n'en connaît pas une semblable, et l'on n'en trouve pas une seconde qui puisse soutenir la comparaison avec elle. Celui qui a présidé à sa construction et à son arrangement fut le commandeur des croyants, [...])
Ai choisi la cour de la mosquée, énorme, tout en marbre, traversée par des grappes d'êtres humains en chaussettes, pour son allure sonore de préau. Des enfants qui courent et hurlent dans toutes les directions. Ce qui n'est pas ce que l'occidental moyen dans sa prison de préjugés attend d'une mosquée. Stéréo au max.


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Vieille ville. Un vendeur de Kébabs puants comme la mort ("Sham paradise") passe de la musique religieuse sur une minuscule place ensoleillée.
Des gens parlent, une voiture passe.


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Vieille ville. A coté d'un "Coffey Shop" un reste de ruines greco-romaines. Accroché à la colonne de marbre blanc, un perroquet en cage. On entend distinctement les gens qui essaient de le faire chanter, mais il n'a pas besoin de se faire prier. La pauvre bête parcours sa minuscule cage par les 6 faces, en permanence. Ce qui donne peut êre une autre tonalité à son "chant".


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radio des flics, enregistrée au péril de ma vie. Je m'approche et le son augmente, je m'éloigne, il diminue.


Avons visité l'ancienne gare du Hedjaz (1908) qui est devenue depuis quelques années une galerie de photos de la ligne de train et une librairie (où l'on trouve Mein Kampf, pourquoi s'emmerder avec les convenances hein ?). Là des gens nous ont reçu avec une jovialité peu commune. Le tout en arabe dans le texte. Eric le comprend un peu, Toleen est né avec. Moi je ne connais que Sharmuta et Choukrane, et Essuie-glace. Alors je me suis mis dans un coin et j'ai commencé à décrire le bureau du directeur de la gare desaffectée du Hedjaz, de la manière la plus naturaliste possible.




Lumière : Néons blancs derrière des grilles carrées insérées dans le faux plafond quadrillé en liège ou équivalent, comme tous les bureaux du monde. Vitraux bleus jaunes et rouges des fenêtres originales, transmettent une douce lumière à travers les deux rangées de rideaux de mousseline (?) verte.
Le soleil pénètre donc la pièce, filtré joyeusement, par la plus grande fenêtre, en face de la porte.


Dimensions : environ 3x3x3.


Ouvertures : La porte. Une porte fenêtre avec un balcon. Une fenêtre derrière le bureau. Au sol en dessous, un sac poubelle noir poussiéreux.




Revêtements : grise un peu vieille sur un mur. Blanche un peu salie sur les autres. Haute plinthe en carrelage noir. Tomettes carrées bordeaux.


Equipement : Télévision (estimée années 90), scanner, laptop, ordinateur de bureau (avec son meuble), bouilloire électrique en plastique bleu. Corbeille en papier en grille métalisée rouge. Sous le plafond un climatiseur Daya.


Mobilier : Bureau noir en bois agloméré avec un plateau arrondi. Set de trois petites tables basses-tabourets en bois marrons foncé avec de la marqueterie sur le plateau (le plus grand a environ 35cm de côté), probable imiation d'un design du milieu du siècle, fauteuils tous identiques placés contre les murs dans tous les espaces vides. Industriels et sans style, coussins marrons en mousse dure recouverte d'un velours élimé. Deux fauteuils de bureau en sky noir, devant le bureau et le meuble d'ordinateur. Porte-manteaux en bois épais a quatres pieds au sol et quatres pieds en haut. Une serviette accrochée à un picot à un mètre du sol. Vitrine des années 40 ou à peu près, très belle, en bois chic mais un peu poussiéreuse, pleines de souvenirs, photos familiales, tour eiffel, 4 classeurs qui n'ont rien à faire là, un livre, un petit cadre avec une plage et des cocotiers (en relief). Sur la vitrine, la télévision et un drapeau syrien sur un petit pied.


Sur le bureau : Plusieurs classeurs, un journal du jour, quelques exemplaires encore pliés d'un autre journal, 2 drapeaux syriens enchâssés dans des presse-papiers en plexiglas qui sont peut-être bien des récompenses. Une belle boîte de bois marquetée très arabe, tout en longueur (un jeu de Backgammon ?). Plusieurs tampons. Une petite pendule sur un socle plexi. Sur le scanner sur le bureau, un globe terrestre (20 cm de diamètre) et un calendrier 2011 du Blue Tower Hotel. 2 briquets, 2 téléphones, une boîte de carte de visite, télécommande du climatiseur, coquillage, mug avec un logo Hijaz, perforeuse, paquet de Marlboro rouge, petit flacon de parfum, casquette marron à la façon des années 50 posée sur un classeur à intercalaires noir. Le long du mur, à l'extrêmité du bureau, 3 téléphones fixes dont l'un est sans fil, et plusieurs prises électriques.


Au mur : 3 photos de la ligne Hedjaz (dont une loco ancienne qui souffle sa fumée dans un beau paysage vert), une carte du Hedjaz. El Assad. Un tableau de liège recouvert d'un tissu noir. Une photo du directeur lui-même, au travail, dans un wagon avec un casque de chantier sur la tête. Deux étranges diplômes en anglais (des affaires de relations syrio quelque chose). Une pendule à digits ovale avec un logo du Hijaz, probablement des années 80. A la droite de la porte une vitrine en méchant métal blanc fixée au mur. Des clefs à l'intérieur.




Le directeur : Sur sa chaise d'ordinateur, le bras gauche sur le bord du bureau, il fume (tout le temps). 1m 65 max. Visage rond très souriant. Moustache fine. Cheveux courts. Je ne peux pas voir ses chaussures. Pantalon vert sombre. Veste gris claire un peu sport. Chemise noire bien tenue. Grosse montre à son poignet poilu. Un peu rond sans être gros.


L'employé photographe : Grosses tennis de jogging, jean bleu usé, chemises à rayures verticales rouges et grises, veston imitation Lacoste. Bedaine. Cheveux blancs. Visage heureux d'enfant prisonnier dans un corps adulte. Lunettes. Il nous montre un photomontage d'images du Hijaz sur son téléphone Nokia (avec la musique de Starwars).









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